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Le tatouage à l'adolescence

L'adolescent à fleur de peau

2nde partie : Le tatouage, marqueur d'identité

De nos jours, les marquages corporels, tels que le tatouage ou le piercing,  ne sont plus considérés comme des pratiques marginales  connotées négativement mais comme un phénomène culturel particulièrement prisé à l'adolescence. Nous aborderons ici la question du tatouage chez l'adolescent lorsqu'il n'y a pas de pathologie psychique avérée.

Le tatouage à l'adolescence, une manière symbolique de prendre possession de soi

Les marques d'une séparation

Lors de cette période charnière qu'est l'adolescence, plus enfant et pas encore adulte, l'individu peut être troublé par tout ce qu'il ne contrôle pas des changements pubertaires. De même qu'il est souvent inquiet quant à son avenir et ambivalent quant à sa place dans le monde des adultes qui lui semble inaccessible. Bien souvent, il souhaite se fondre dans le groupe de ses pairs adolescents tout en arborant des signes qui font de lui un être unique. Le tatouage peut alors permettre de se conformer à sa classe d'âges et à ses codes notamment esthétiques tout en revendiquant son identité personnelle.

L'adolescence comme période charnière

Face à toutes ces préoccupations, l'adolescent va chercher un moyen de se réapproprier son corps, de se distinguer de sa famille et de prendre son autonomie.  Les marques corporelles, sur la peau à la frontière entre le dedans et le dehors, peuvent alors être considérées comme une manière symbolique de prendre possession de soi à défaut de pouvoir contrôler son existence.

Dans les sociétés traditionnelles, nous avons vu que le tatouage pouvait faire partie de rites de passage permettant la transmission et la filiation. Dans nos sociétés contemporaines, il s'agit plutôt d'un épisode de l'existence visant à prendre son autonomie en affirmant l'appartenance de son corps et son individualité.

Des marques pour se démarquer et être remarqué

De  part ces signes tégumentaires, l'adolescent peut se faire remarquer et attirer le regard sur un mode provocateur, ludique ou séducteur. Ceci le rend singulier et peut lui permettre de mieux s'accepter en se faisant à son image avec sa propre "marque de fabrique". Les marques corporelles auraient alors une fonction narcissisante  "qui permet de se reconnaitre et de se revendiquer comme soi".

Une mise en récit de soi à travers la peau

Les significations du tatouage sont subjectives c'est-à-dire que l'on ne peut pas appliquer une correspondance entre l'acte de se faire tatouer, l'endroit du corps ou le motif choisis et une interprétation d'ordre général. Pour chacun, il s'agit de significations personnelles et intimes dont seul le sujet est possesseur même s'il n'en connait pas consciemment le sens. Les marques corporelles sont alors des récits d'existence dont le corps garde la mémoire.

"La modification corporelle est une limite symbolique dessinée sur la peau, elle fixe une butée dans la recherche de signification et d'identité, elle est une sorte de signature de soi par laquelle l'individu s'affirme dans une identité choisie." David Le Breton

Déchiffrer le message

Se faire tatouer n'est donc pas un acte anodin. Bien souvent les parents sont opposés à la démarche avant la majorité légale notamment par crainte que l'adolescent ne regrette son tatouage. Il est alors important,  mais chose pas toujours aisée, d'ouvrir et de maintenir le dialogue avec l'adolescent en le questionnant sur ses envies et motivations. Écouter et inviter l'adolescent à mettre des mots sur ce que représente pour lui cette démarche permet de déchiffrer le message qui bien souvent est une adresse et une manière d'interroger les limites. Qu'il soit d'accord ou pas, le parent doit faire référence à l'importance de se donner du temps pour y réfléchir ensemble.


Lecture pour approfondir

 

 

Dans ce livre, Xavier Pommereau, psychiatre français spécialiste de la question adolescente, explore le langage de la peau afin de faire la part entre ce qui relève de l'ordinaire et ce qui doit inquiéter.